Rafraîchissement

Après quelques mois d’inactivité, je viens d’effectuer une refonte de cet espace-web, qui devient plus représentatif de l’ensemble de mes activités d’écriture. D’un espace de création littéraire en ligne, il évolue vers une vitrine plus générale. J’y intègre désormais tout ce qui concerne mes réalisations en jeunesse, qui constituent une partie essentielle et importante de mon travail d’écriture. Le « gros morceau » est l’intégration de la liste de mes publications jeunesse > ici

L’occasion aussi d’annoncer deux parutions ce mois-ci, en jeunesse justement : un récit dans un magazine et un album documentaire.

yémoutDans Expédition yémout, un petit garçon protège un animal mystérieux contre son père et ses acolytes qui veulent le chasser. Ou comment défendre ses convictions, même face à ceux qu’on aime. Les illustrations d’Aurore Damant donnent un côté cartoon à cette histoire à l’ambiance himalayenne. Le magazine contient un CD avec le récit lu par des comédiens pétillants !
Expédition yémout, ill. Aurore Damant, dans J’apprends à lire, n°195, Milan presse (5-7 ans)

La mare aux crocosLa mare aux crocos compile des fantaisies anthropozoologiques africaines : des hyènes choyées par une cité, une mare aux crocodiles sacrés, un paradis pour hippopotames, des relations mystiques avec des lamantins… Un livre pour déceler le lien intime qui unit tous les êtres vivants entre eux et avec la planète. Avec les illustrations d’Hélène Georges, aux couleurs inventives, mises en valeur par une maquette épurée et un grand format.
La mare aux crocos, ill. Hélène Georges, Actes Sud junior, avec le soutien du CNL (à partir de 9 ans)
Premiers avis :
> Culturellement vôtre
> Librairie Tire-Lire

#8 Le silence de la porte

© Yolande Benoist Des mots pour la mémoire Maison des esclaves, Gorée, Sénégal, 2009

© Yolande Benoist
Des mots pour la mémoire
Maison des esclaves, Gorée, Sénégal, 2009

Il y a une petite porte qui en dit long sur la grande histoire de l’Afrique. Une petite porte, dans une petite maison, sur une petite île d’un petit pays. C’est celle que l’on trouve dans la maison des esclaves à Gorée, au Sénégal. On y accède après avoir traversé les cellules où croupissaient les hommes, les femmes, les jeunes filles, les inaptes et les enfants (tous séparés). Il faut se baisser car le plafond est tellement bas qu’on ne peut pas se tenir debout.

« La porte du voyage sans retour ». La lumière éblouit. Le visiteur se tient là, face à l’Océan atlantique, imaginant les pensées et les frissons indicibles de l’esclave avant d’embarquer. Joseph N’Diaye, le conservateur aujourd’hui disparu, est éloquent. La seule alternative  était le saut dans les vagues. Deux conséquences possibles : être abattu par un gardien ou se faire dévorer par les requins qui pullulaient à l’époque, attirés par les cadavres des malades et des agonisants jetés ici. Silence. Sentir l’histoire dans sa chair. L’émotion et la pudeur freinent les ardeurs photographiques.

Puis on retourne dans la cour. Rose, lumineuse. Sur les autres portes, s’affichent des mots pour la mémoire, pour le souvenir, pour le respect. Des mots tracés à la main, avec application, par Joseph N’Diaye. Des mots qui s’effacent mais dont la force reste indélébile. Des écrits qui disparaissent mais dont la récitation se perpétue. N’en déplaise à certains, l’Afrique a une histoire. Qui est aussi l’histoire du monde.

Nota bene : ne pas oublier ce qui s’est passé hier, saupoudrer l’actualité d’histoire pour y voir plus clair.

Merci à Yolande Benoist pour la photo.

#3 L’histoire du petit berger

© Sophie Anglade Les mots du berger, Ariège

© Sophie Anglade
Des mots sur la montagne, Ariège

Petit berger tu étais là, petit berger au sommet des montagnes, petit berger englué dans l’histoire, petit berger, petit héros. Mais sans goutte d’eau que serait l’océan ? Petit berger, tes brebis ont pris une allure de nazis, l’uniforme a remplacé la douceur de la laine. Les patrouilles ressemblaient à des ballets de fourmis. Petit berger transformé en entomologiste. Après la guerre, tu es retourné à tes moutons. Comme une virgule dans une phrase, tu as participé à l’histoire, discrètement, mais sans toi, tout aurait pu être différent.

Soixante-dix ans plus tard, tu n’es toujours pas dans les livres, tout le monde a oublié le petit berger, même ceux qui étaient là. Pris dans le tourbillon de la vie, toi-même tu ne pensais plus à 1943, l’année de tes 14 ans, l’année où tu t’es transformé en adulte, en héros, toi, le petit berger qui pistait les patrouilles depuis le pic pour que le passeur puisse faire passer.

À chaque commémoration, les flonflons te gonflent mais tu repenses au petit berger, aux heures infinies à arpenter la rocaille, à apercevoir les patrouilles, à sentir la pierre sous des godillots de pacotille. Et tu te demandes si le passeur est toujours en vie. Ceux qui sont passés existent-ils encore ? Comment les survivants des patrouilles ont-il fait pour traverser l’existence ?

Alors tu le fais ce pèlerinage, tu y retournes sur ta montagne, tout seul, comme ça, sans prévenir personne. Tu as pris ta peinture et tes vis. Tu ne sais pas très bien pourquoi tu fais ça, mais tu sais pour qui : pour ceux qui traversent les montagnes pour le plaisir. Tu écris ton histoire pour leur dire : marchez autant que vous voudrez, marchez jusqu’à vous faire mal, vous ne sentirez jamais la montagne du petit berger devenu papy pèlerin.

© Sophie Anglade Les mots du berger, Ariège

© Sophie Anglade
Les mots du berger, Ariège

Merci à Sophie Anglade pour les photos. Retrouvez-la ici > SO’PICS